On réfère habituellement la psychogénéalogie à Anne Ancelin Schutzenberger. Psychologue, Professeur émérite à l’université de Nice Sofia-Antipolis, A. Ancelin s’est formée auprès de J. Lévy Moreno, et d'autres chercheurs, thérapeutes aux États-Unis notamment.
Ses observations, son expérience de psychothérapeute de groupe, ses connaissances en psychologie sociale, psychanalyse, systémie l’ont amenée à élaborer la psychogénéalogie comme une méthode d’analyse de l’histoire familiale et généalogique d’un sujet en prenant en compte les évènements vécus à d’autres générations (deuils, traumas, migrations, etc.), non surmontés émotionnellement et ayant transité dans la descendance pour se manifester sous forme de symptômes physiques, psychiques, de maladies, de répétitions de toutes sortes à certaines dates ou moments marquants de sa vie.
La psychogénéalogie est constituée de plusieurs courants :
– Approche psychanalytique avec les travaux de Nicolas ABRAHAM et Maria TOROK sur les symptômes ou pathologies résultants de secrets inavouables, de deuils non faits, et ainsi de clivages psychiques entraînant des comportements, des réactions incompréhensibles pour le sujet lui-même et son entourage. Les concepts de « crypte » et « fantôme » sont nés de ces observations, que l’on peut traduire par une construction psychique comportant des « trous », des lacunes hérités de secrets inavoués et non métabolisés (cryptes) dont les parents peuvent être à l’origine ou bien eux-mêmes porteurs de fantômes. La crypte d’un parent (ou grand-parent...) entraîne certains comportements étranges que l’enfant ne comprend pas, qu’il va interpréter à sa façon et à partir de son environnement tout en exprimant des symptômes (fantômes) qui laissent entrevoir des éléments vus, entendus, perçus, de ce ou ces secrets, et ressentis par lui.
Exemple : Joëlle, âgée d’une quarantaine d’années, fait une démarche en psychogénéalogie, car elle cherche à comprendre l’origine de ses troubles alimentaires qui surviennent chroniquement lors de périodes hivernales. Elle a déjà suivi de nombreuses thérapies ainsi qu’une analyse de plusieurs années. Ces crises ont débuté lorsqu’elle avait 17 ans, peu après la mort de son père, décédé en novembre d’un cancer de l’œsophage. Elle a déjà abordé à maintes reprises cet épisode tragique de son adolescence et le lien avec ses troubles boulimiques où elle se fait vomir. Dans l’investigation de son arbre familial (représenté par un génosociogramme), certaines places sont illisibles, ou raturées, avec des informations manquantes. Ces lapsus graphiques signalent souvent une mémoire qui se cache tout en cherchant à s’exprimer. Des bribes de souvenirs reviennent dans le récit de Joëlle, un enfant décédé à 4 ans qui se serait étouffé (??!), frère de sa grand-mère paternelle, et une sœur de sa mère dont elle n’avait jamais parlé, qui serait morte d’une péritonite (est-ce une version officielle pour cacher une cause de décès inavouable ??). À partir de l’exhumation de son histoire familiale, certaines pièces du puzzle se sont rassemblées et cela lui a permis de donner du sens à ses symptômes et de retrouver un mode de vie plus confortable dans sa relation avec son corps.
Dans cet exemple, les cryptes sont portées par la grand-mère paternelle (le père de Joëlle ayant hérité du fantôme de l’enfant décédé, dont il portait une partie du prénom) et par la mère de Joëlle, habitée par la mémoire de sa sœur, morte quand elle avait 17 ans. La façon dont Joëlle a cherché à la fois à comprendre et à se libérer de ces traumas, vécus par la génération de ses parents et grand-parents, s’est manifestée dans des troubles alimentaires.
– Autres auteurs, chercheurs qui ont largement contribué à faire avancer et ouvrir le champ de la dimension psychique aux transmissions transgénérationnelles : Didier Dumas, Serge Tisserron, Claude Nachin, A. de Mijolla, et d’autres encore...
– Approche systémique Les recherches menées par le Mental Research Institute à Palo Alto dans les années 1950 ont ouvert un champ d’investigation et de recherches sur la communication, les relations entre les individus et l’émergence de la systémie dans la thérapie familiale. Parmi ces chercheurs, Don Jackson, G. Bateson, P. Watslawick, S. Menuchin, V. Satir, et bien d’autres ont contribué à enrichir la compréhension des relations dans les groupes d’individus et surtout des familles. Yvan Boszormenyi-Nagy, psychiatre, a créé la thérapie contextuelle systémique et a conceptualisé les loyautés, la balance de justice, la légitimité constructive/destructrice… Ses travaux sont particulièrement éclairants dans le travail psychogénéalogique. Lui-même, Y.B Nagy recevait les familles sur 3 générations pour comprendre les difficultés, conflits, crises vécues dans le système familial.
– Approche sociologique V. De Gaulejac, sociologue et professeur des universités émérite, est l’auteur de nombreux ouvrages et fondateur de la sociologie clinique dans laquelle il intègre la généalogie familiale pour comprendre les transmissions en matière d’héritages affectif, culturel, social, économique, symbolique…
– Approche scientifique (Source Wikipedia) En 2015, une étude menée par des chercheurs de New York et du Max Planck Institute of Psychiatry a démontré pour la première fois qu’un traumatisme parental pré-conception peut être transmis aux enfants via des altérations épigénétiques. Les auteurs ont étudié la présence d’effets sur la protéine FKBP5 (une protéine de la famille des Immunophilines, impliquée dans la réaction immunitaire) à la fois chez des survivants de l’holocauste et leurs enfants, mais pas sur les groupes témoins.
C’est une première démonstration chez les humains qu’un traumatisme psychologique peut avoir un effet intergénérationnel observable biologiquement. A voir également les travaux sur l’épigénétique et le cas de la famine dans l’ouest des Pays-Bas en 1944 , les enfants des femmes enceintes à cette période particulièrement éprouvées par la faim, étaient atteints de pathologies telles que le diabète, l’obésité, des maladies cardiovasculaires et étaient plus petits que la normale, leurs descendance a subi également les effets de ce trauma, puisque les enfants étaient aussi plus petits que la normale..
D’autres courants comme le décodage biologique s’appuient sur les transmissions transgénérationnelles pour comprendre l’origine émotionnelle des symptômes et maladies.
Les constellations familiales
voir site www.lesconstellationsfamiliales.fr
Tous droits réservés – Maureen Boigen
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