De nombreuses femmes à travers la planète s’éveillent pour revendiquer une place de femme adaptée au monde dans lequel nous vivons aujourd’hui. Cette place, qui inclut la parole et le corps, est encore bien peu respectée dans de nombreuses situations et de plus, les transmissions des femmes qui nous ont précédées dans les générations antérieures ont laissé une empreinte puissante dans l’esprit des femmes d’aujourd’hui.
C’est un énorme chantier (!!) Les conditions de vie des femmes d’hier sont souvent en décalage avec ce que vit une femme aujourd’hui tant dans son féminin de femme que dans son féminin maternel et pourtant dans le for intérieur des femmes d’aujourd’hui, il persiste des peurs, des angoisses, des émotions plurielles, qui font penser que les souffrances des femmes d’hier transitent chez leurs descendantes à travers des symptômes psychiques ou physiques dont la plupart des femmes sont conscientes.
La parole silencieuse de ces femmes-ancêtres muselée par des secrets encore verrouillés, exprime toute la complexité d’autoriser à se donner une pleine expression dans son être femme d’aujourd’hui. Revendiquer une identité sexuée tout en valorisant ses capacités d’esprit et de cœur reste un défi. Pourtant depuis quelque temps, la parole se délie, les femmes parlent et dénoncent les abus. Que ce soient des abus psychiques, affectifs, sexuels, le besoin de se libérer d’expériences traumatiques les mobilise vers une démarche transgénérationnelle pour extraire les racines d’humiliations, de soumissions, de colères et de silences. Tout aussi important et indispensable est la transmission des forces que ces femmes d’hier ont accumulé dans les diverses expériences rencontrées. Le potentiel féminin contenu dans ces transmissions est en attente d’être actualisé par les descendantes de ces lignées. Pour autant, il est incontournable de se retourner sur le tragique des vécus antérieurs et traverser les effets des souffrances antérieures pour récupérer le courage, l’énergie disponibles à ces places de femmes.
Le poids du passé familial, ancestral est énorme et les femmes d’aujourd’hui peuvent récupérer un potentiel important de ce qui est resté suspendu, inachevé, souffrant et en attente d’accomplissement.
J’ai moi-même compris l’importance dans mes lignées féminines, encombrées de fantômes et de blessures de mes grand-mères frustrées, silencieuses et dans une violence intériorisée du silence imposé, de ce travail de retour vers mes sources de vie pour y puiser le sens et renouveler le sang d’une transmission vivante. Ces femmes qui m’ont précédée sont faites de courage, de douleurs, de blessures d’humiliation dans leur cœur et leur corps de femme et de deuil d’enfants dans leur cœur de mères. Ce qui me touche le plus c’est ce défaut de paroles, d’expression de leur être, dans ce qu’elles ont dû enfermer, cloîtrées dans les murs des conventions sociales de leur époque, de la morale, du regard d’autrui et du jugement sur elles-mêmes.
J’ai recueilli la sagesse et la bienveillance de ma grand-mère paternelle, émigrée de Pologne, ayant fui les persécutions que j’ai connu trop peu de temps mais dont il me reste une présence digne et humble, un regard doux et profond et la légitimité de la quête du sens de l’existence.
Cette voie du féminin est non seulement à explorer sérieusement, mais ces voix ont besoin d’exprimer le vivant de leur destin, de se faire entendre et d’être accueillies. Il y a une vraie nécessité à se défaire des fardeaux si pesants dans le corps des femmes qui se manifestent à travers douleurs et lourdeurs.
De très nombreuses femmes vivent en s’oubliant, en s’exilant de leur corps, de leur âme et parfois de leur cœur. Elles se retirent au profit de l’autre. Cette qualité du souci de l’autre, elles ne peuvent l’appliquer à elles-mêmes car cela ne s’est pas transmis ainsi. Dans les générations antérieures, il était valorisé de s’occuper d’autrui et pas de soi. Il fallait se mettre au service de l’Autre (famille, société, Dieu..). Il était mal vu, mal perçu de déroger à cette morale. Alors les filles ont appris à faire plaisir, à plaire, à séduire pour se faire accepter, aimer, désirer tout en effaçant soigneusement leurs besoins profonds, leurs désirs secrets et sacrés. Ces besoins et désirs refoulés sont la source de manifestations de mal-être, de malaises, de maladies, symptômes physiques et/ou psychiques qui apparaissent en signal d’un besoin de reconnaissance et de reconnexion à soi, à son âme, à sa nature profonde.
L’éducation, pendant des décennies, s’est portée sur l’apparence, la beauté, gages d’assurance pour trouver un mari. Plus tard, dans les générations soixante-huitardes, les mères ont voulu pour leur fille des études, pour conquérir une place qu’elles n’avaient pas pu revendiquer à leur époque. Faire de leur fille, une femme indépendante financièrement pour ne pas dépendre du mari est devenu un projet important pour les parents et surtout pour les mères envers leurs filles.
L’arbre du féminin nous aide à mettre en lumière les traumas vécus antérieurement et intérieurement et indique tout autant les blessures des femmes qui peuplent nos lignées, que la façon de trouver le chemin pour soi dans une place de femme enracinée dans son présent d’aujourd’hui. Les mères et grand-mères de notre généalogie ont traversé des épreuves qui ont affecté leur place, leur corps, leur cœur de femme et/ou de mère. Plus ou moins bien accueillie en tant que fille, elles se sont élevées dans la société selon des codes et des valeurs propres à leur époque. Elles ont transmis la vie dans des conditions souvent douloureuses. La reconnaissance des places du féminin dans l’arbre familial et ancestral apporte une reconnaissance à notre propre place de femme.
Renouer avec sa souveraineté naturelle, c’est décider pour soi-même de sa vie et pour cela le retour au corps est indispensable pour retrouver les perceptions sensorielles du vivant. C’est le lieu pour s’appartenir, pour sortir du maternel et entrer dans l’être femme en exprimant ses besoins ses désirs, et en sortant des comportements infantiles du devoir plaire avant de se faire plaisir.
Quelques exemples parmi tant d’autres rencontrés dans ma pratique :
Noémie, 37 ans ne comprend pas pourquoi elle n’arrive pas à avoir un enfant malgré de nombreuses tentatives en PMA. Dans son arbre familial, Noémie est la 2ème enfant dans une fratrie de 4, mais elle est aussi la 3ème, car le 1er est décédé à quelques jours après l’accouchement. Lorsqu’on regarde dans l’arbre maternel, la grand-mère a eu un 1er enfant mort à 1 mois, et l’arrière-grand-mère a aussi perdu un 1er enfant.
Dans cette transmission, on voit que la place du 1er enfant est risqué. Noémie découvre cette répétition et c’est pour elle comme un « ciel qui s’ouvre ». Lui revient en mémoire certaines paroles de sa grand-mère qui déplore la grossesse et répète qu’une femme devrait être libre de choisir de ne pas avoir d’enfant. La mère de Noémie quant à elle, harcèle sa fille pour qu’elle « tombe enceinte ». Noémie prend conscience de tous ces enjeux et s’allège de la pression qu’elle se met à travers sa mère et l’histoire qui la précède. J’apprendrais quelques mois plus tard qu’elle est enceinte..
Natacha, 56 ans, se sent bloquée dans sa vie amoureuse, elle a divorcé il y a 12 ans et ne retrouve pas un compagnon avec qui elle pourrait envisager un couple durable. Les lignées de femmes dans son arbre montrent combien nombre d’entre elles sont restées seules, veuves ou divorcées après un 1er mariage. Sa mère reste nostalgique de la vie conjugale avec le père de Natacha dont elle s’est séparée (sans divorcer) après 20 ans de mariage. Natacha est très proche de sa mère et éponge patiemment les regrets que cette dernière évoque et notamment qu’aucun homme ne pourra remplacer son mari parti avec une autre femme.
Natacha découvre dans le processus transgénérationnel combien elle est en colère face à ces femmes restées seules qui ont accepté leur sort comme si elles le méritaient. C’est la colère qui servira de déclencheur pour que Natacha se désidentifie de ces destins de femmes, de mères et qui sont restées au fond des filles de leur propre mère sans accéder à leur place de femme.
Sylviane, 48 ans, vit dans une dépression larvée depuis de nombreuses années et se sent incapable de prendre sa vie en charge. Dans le cas de Sylviane, le travail transgénérationnel a mis longtemps a démarré, comme si elle ne pouvait pas, ne voulait pas regarder au-delà de sa propre histoire. Une histoire jalonnée de deuils rencontrés lorsqu’elle était déjà enfant. C’est en dévoilant la place d’une 1ère femme de son arrière-grand-père, décédée à 24 ans qu’elle saisit les concordances de dates et même de prénom. Cette jeune femme s’appelait Sylvette.
Sylviane fait le rapprochement avec la période de ses 24 ans, sa 1ère dépression après une rupture amoureuse brutale. Nous avons réhabilité cette place de Sylvette, retracé sa vie, et tout ce qu’elle a laissé derrière elle de regrets, nostalgie, tristesse chez son jeune mari, qui bien que remarié quelques années plus tard a gardé en lui l’amour de sa 1ère épouse. Sylviane a regagné des forces de vie, s’est engagée dans une voie artistique qu’elle n’arrivait pas, jusqu’à présent, à investir.
Depuis plusieurs années, j’ai à cœur d’accompagner les femmes vers un processus de transformation et de réappropriation de leur désir, de leur force et de leur espace sacré. Les stages que je propose mettent l’accent sur la place des femmes à travers les générations sur la relation à leur corps à travers les trajets de transmissions afin de délivrer l’élan créateur de leur nature profonde. Les stages pour expérimenter l’arbre du féminin et se réapproprier ses forces de femme.
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