La Psychogénéalogie est, pour moi depuis bien longtemps, une méthode thérapeutique à part entière. Cela va de soi, mais aussi particulière. Dans le néologisme du mot psychogénéalogie, il faut entendre autant la part « psycho » que la part généalogie. Ainsi, on vient questionner autant dans l’enquête généalogique que l’on mène auprès des archives et/ou dans le cadre familial, que la place occupée dans son système familial.
C’est aussi dans l’art de questionner que le thérapeute en psychogénéalogie a été formé. La demande dans ce travail transgénérationnel concerne presque toujours la place, même si ce n’est pas formulé clairement au départ. C’est bien à partir de la place que tout commence, de la conception, à la naissance, au nom et prénoms qui nous sont attribués, au rang dans la fratrie et à tous ceux qui composent notre paysage familial.
Quelle est ma place ? Comment je l’occupe ? À qui, à quoi suis-je relié.e consciemment et inconsciemment ? Quelle place je me donne ? Et à quelle place on me met ?
Parfois jusqu’à occuper plus un rôle que ma propre place afin de satisfaire des attentes et/ou pallier aux manques et aux absents de l’histoire familiale dont je suis issu.e.
Mais quelle est cette histoire ? Qu’est-ce que j’en connais ?
Parfois les personnes disent : "Je ne sais rien de ce côté-là de ma famille…" Or, de façon étonnante, force est de constater qu’on en sait bien plus qu’on le pense. Et l’art de questionner du thérapeute va faire que des histoires resurgissent sans effort de se remémorer, au grand étonnement du/de la cliente.
Je précise toutefois qu'il ne s’agit en aucun cas de forcer quoi que ce soit dans la mémoire qui sait très bien préserver ce qui a besoin de l’être. Les secrets, les non-dits, les interdits, s’ils sont au cœur du travail en psychogénéalogie, ne font pas l’objet d’un questionnement acharné. Il y a lieu de respecter avant tout le temps nécessaire à la sortie du secret en lui-même. Mais on peut questionner autour du secret et dans les effets du secret. Et la manière de restaurer les liens.
J’aime ce travail restauratif car nous sommes des êtres de liens, profondément ancrés dans le lien de façon biologique puisque nous arrivons au monde en ayant été porté par un autre (une autre en l’occurrence !) et dans une famille ou à défaut dans un lieu d’accueil conçu pour prendre soin du bébé.
Les liens que l’on restaure sont dans un premier temps invisibles. Ils peuvent concerner nos parents, grands-parents et notre fratrie et l’au-delà de notre histoire. Les liens en question sont ceux qui sont restés dans l’ombre des relations et qui ont bien souvent empêché de s’approcher, de questionner et d’aimer.
Par exemple, dans un conflit parent-enfant, quelle que soit la génération, si on s’en tient aux relations anxiogènes ou délétères, le circuit de communication est fermé. Or, si on prend en compte les situations, les évènements qui ont concerné chaque protagoniste, on arrive à une compréhension qui modifie les liens, voire la relation.
Ces liens invisibles ont retenu nos parents et autres proches dans leur histoire sans qu’ils puissent s’en détacher, embarquant ainsi leur entourage dans un passé qui n’est pas de leur fait. En réajustant les données biographiques de chacun, on restaure les liens, on se restaure dans le lien avec eux et leur histoire.
C’est un travail thérapeutique progressif au fil des informations qui se présentent et enrichissent le processus transformationnel. On tricote du lien dans ce travail psychogénéalogique autant dans la quête d’informations que dans les liens inter et transgénérationnels et ça libère notre futur pour investir d’autres liens et élargir l’horizon de nos vies.
Maureen Boigen @ tous droits réservés
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